Dans l’article précédent Votre secteur est-il en danger d’ubérisation ?, nous avons vu les questions que vous devez vous poser pour préparer votre parade. Nous abordons aujourd’hui les méthodes… et notamment celle que je recommande aux entreprises, la « matrice du business model ».
Pourquoi s’intéresser au business model ?
Parce que, dans le cas de l’ubérisation, l’innovation dépasse largement l’innovation sur le produit. Elle concerne tous les éléments du business model. Uber ne s’est pas contenté d’offrir aux clients une offre supérieure à celle des concurrents établis (facilité de réservation, réactivité des chauffeurs, qualité de la prestation, commodité du paiement, etc…)
Uber a révolutionné le business model. Sa structure de coûts est radicalement différente de celle d’une société de taxis. Elle ne supporte pas de frais de licences (ses chauffeurs sont des VTC et non des taxis), ne possède pas de flotte de véhicules, n’a pas de centre d’appels pour les réservations. Par contre, elle a une activité intense de développement logiciel pour faire évoluer son application sur smartphone et créer une relation personnalisée avec chacun de ses clients.
Comment utiliser la « matrice du business model » ?
Pour évaluer la menace d’ubérisation sur votre secteur, commencez par utiliser la « matrice du business model ». C’est un outil qui permet de créer rapidement une vue d’ensemble du business model de chaque entreprise. Il a été développé par Yves Pigneur et Alexander Osterwalder et il est décrit dans leur excellent livre « Business Model Nouvelle Génération ».
Pour chacune des 9 composantes du business model, posez-vous la question suivante : comment les technologies numériques peuvent-elles remettre en question mon business model ? Et aussi : comment construire un nouveau business model qui prenne en compte les opportunités du numérique ?
- La proposition de valeur : par exemple, en offrant un thermostat connecté qui se programme tout seul, Nest apporte une valeur inespérée à tous ceux qui sont allergiques à la programmation.
- Les segments de clients : les cours virtuels des MOOC ouvrent l’enseignement à de nouvelles catégories de d’étudiants. Ce sont par exemple les employés qui n’ont pas le temps de se déplacer et suivre un cours magistral.
- La relation client : en offrant un compte où les voyageurs peuvent retrouver l’historique de leurs réservations partout dans le monde, Booking.com devient le partenaire de voyage privilégié de ses clients.
- Les canaux de distribution : Uber utilise essentiellement son application sur smartphone comme canal de vente.
- Les activités clés : plutôt que de répondre aux appels des clients depuis un centre d’appels, Uber a développé une application sur smartphone qui met en liaison taxis et usagers.
- Les ressources clés : La base de données client et la maitrise des techniques Big Data sont une ressource essentielle pour Airbnb, Uber, Booking.com, etc.
- Les partenaires : Airbnb a pour partenaires Facebook et Twitter pour faire connaître leurs offres et les photographes pour mettre en valeur les biens loués.
- Le flux de revenus : Airbnb reçoit deux flux de revenus : une partie vient des propriétaires de logement (3% du loyer) et l’autre partie vient des locataires (6 à 12 % du loyer).
- La structure de coûts : Compte-Nickel offre à ses clients un compte en banque qui ne peut jamais être à découvert parce que toutes les transactions sont traitées en temps réel. Nickel évite ainsi les frais de litige associés aux découverts.
Cette démarche vous permettra de saisir les opportunités du digital soit pour réduire la vulnérabilité de votre business actuel, soit pour en créer un nouveau, en rupture.
Dans mes prochains articles, nous parlerons du « job-to-be-done », une technique pour avoir l’intuition de pistes d’innovation… puis de la prospective. N’hésitez pas à vous inscrire gratuitement à ce blog pour être informé de leur parution !
7 questions sur la qualité de votre business model







« Technological innovation does not guarantee business success – new product development efforts should be coupled with a business model defining their ‘go to market’ and ‘capturing value’ strategies with a focus on sustainability. »
Si j’ai bien compris, l’innovation de rupture née d’une réinvention du modèle économique, par rapport à l’existant. Il s’agit donc pour l’entreprise qui souhaite créer une rupture, de s’approprier une technologie (soit éprouvée soit émergente), et de l’inclure dans un nouveau business model.
Ce que je ne comprends pas, c’est comment une entreprise dans le numérique crée de la valeur et la capture ? Auriez-vous des exemples concrets?
Merci
Un bon exemple d’entreprise numérique qui crée de la valeur est le compte Nickel. Grâce à une application sur smartphone, Compte Nickel permet à l’utilisateur de faire des transactions bancaires en temps réel sans que son compte puisse jamais être à découvert. Donc il n’y a jamais de frais d’agios pour cause de découvert. Voici une valeur ajoutée nouvelle apportée grâce au numérique.
Ah oui effectivement, c’est génial. Et pour l’entreprise, y a t-il de capture de valeur (positionnement) à un moment? Est ce un changement de réseau de valeur par rapport à ce qu’il se fait, qui vient bouleverser une certaine logique dominante?